Alexiane, Grèce

Un vide que seul l’amour peut combler

En proie à la solitude et au désespoir que la drogue ne comble pas, les sans-abris d’Athènes reçoivent des soeurs de mères Térésa la présence et l’attention qui répondent à leur vraie soif.

Nos apostolats sont nombreux et uniques. En plus de la maison de retraite que nous visitons chaque mardi, nous nous rendons également chez les Sœurs de Calcutta (les sœurs de Mère Teresa) pour les aider à la préparation d’une grosse quantité de sandwichs et de chocolat chaud que nous apportons ensuite aux drogués et aux sans-abris de certains quartiers d’Athènes. J’ai été marquée par le nombre de jeunes hommes et de jeunes femmes de toutes nationalités que nous rencontrons dans les rues. (A Athènes, on trouve tous les pays du monde et on y parle toutes les langues).

Une grande majorité de ces personnes sans-abris se plongent dans la drogue pour oublier leur malheur et leur solitude. Ils sont perdus, déboussolés et repoussés par la société. La plupart du temps, nous les trouvons en petit groupe, allongés sur des couvertures sales, au milieu de milliers de petits morceaux de verres tranchant. Leurs corps sont recouverts de plaies infectées mais heureusement que la robuste et vaillante petite sœur Adda est là pour soigner de tout son amour ceux qui le souhaitent. Du haut de ses quatre-vingt ans, sœur Adda parcoure les rues étroites d’Ote d’un pas sûr et rapide. C’est notre infirmière tout terrain. Elle ne part jamais sans sa petite trousse de pharmacie. A l’intérieur, on y trouve ses fidèles gants en latex, une bouteille de désinfectant, des bandages, des pansements et des compresses. Bien que nous soyons tous conscients qu’un pansement ne suffira pas à les soigner, pour sœur Adda, c’est un moyen de se rapprocher de nos amis de la rue et de leur montrer que nous sommes là, que nous les voyons et que nous ne sommes pas indifférents à leur souffrance. Avec sœur Adda, impossible d’avoir honte, de se sentir mal à l’aise ou gêné. Bien au contraire, tout le monde réclame son aide, un peu de sa patience, de sa gentillesse, un peu de son amour qui guérit tout. Avec elle, on se sent toujours bien, elle est une consolation pour nous tous, elle est une main tendue vers la souffrance.

Lors de notre dernière visite, j’ai été touchée par la manière dont les gens regardent les Sœurs de Calcutta. Elles suscitent un profond respect dans le cœur de chacun, pour ce qu’elles sont et ce qu’elles représentent. Leur habit est un drapeau blanc, une branche d’olivier. Leur force de caractère est incroyable et leur belle humilité, un exemple à suivre.

Récemment, nous avons rencontré Monsieur Créonidas, un Grec d’une trentaine d’années qui vient se droguer avec d’autres sur une place située en hauteur. Nous avons parlé de beaucoup de choses : de la santé, la drogue, l’alcool, la cigarette. Nous avons parlé de Dieu et de sa famille. Il était heureux de savoir que je ne buvais et fumais pas. Sa première réaction a été de se préoccuper de moi. J’ai été touchée par sa sensibilité. Notre conversation était un mélange d’anglais et de mauvais grec, mais elle était vivante. Créonidas riait souvent et s’est beaucoup confié. Il m’a raconté que si ses amis et lui se droguent, c’est parce qu’ils cherchent désespérément à combler un vide immense qu’ils ont en eux et qui les empêchent de vivre librement. Ce vide, c’est la solitude, le désespoir et le sentiment de ne pas s’en sortir. Et plus ils se droguent, plus ce vide s’agrandit et les déchirent.

Malgré ces choses qui nous dépassent et devant lesquelles nous sommes impuissants, nous sommes toujours heureux d’aller visiter nos amis des rues, de parler avec eux, d’écouter ce dont ils ont besoin et de les voir sourire. Leur faire oublier ne serait ce qu’un instant cette dure réalité.