Etienne, Uruguay

Les petites grand-mères

Etienne nous raconte une visite à une petite grand-mère du foyer de Mère Térésa, visite en apparence bien banale mais qui suffit à éclairer la journée de l’un et de l’autre.

Comme j’ai dû vous le mentionner dans une de mes lettres, nous vivons à deux pas d’un foyer des Sœurs de Mère Teresa. En plus d’avoir la chance de voguer aux cotés de véritables saintes ambulantes (le vœux de “service des pauvres” qui s’ajoute aux trois “classiques”, est incarné d’une manière si radicale que même le cœur a de la peine à embrasser leur réalité ; ma tête a déclaré forfait depuis longtemps dans son obsession de compréhension), nous avons eu le plaisir d’hériter d’une trentaine de grands-mères supplémentaires. (PS : ça me fait beaucoup de grands-mères adoptives, mais Mam tu restes la première).

En effet, en plus d’accueillir les gens de la rue, de dispenser cinq catéchèses, de visiter le quartier, d’animer la vie de la paroisse, la maison des Sœurs est aussi un foyer qui accueille et prend soin d’une trentaine de grands-mères. Passant régulièrement par cette maison (dont on ressort plus saint qu’on y est entré), chacun de nous a pu lier des liens avec certaines de ces petites grands-mères.

Ma plus grande pote là-bas est Ramona, elle perd la mémoire et oublie quasi systématiquement qu’elle me connaît mais j’aime passer une vingtaine de minutes avec elle et parler de sa vie d’avant ou du dernier livre qu’elle lit, ou parfois juste pousser son fauteuil roulant jusqu’à la salle à manger et lui donner un baiser. C’est simple, c’est un peu décontenançant. Je ne sais pas forcément de quoi parler mais ces “visites étincelles” suffisent parfois à éclairer nos journées arides. La mienne, aride dans son austérité et la sienne, aride dans la monotonie d’un quotidien confortable mais manquant d’un peu de vie, de joie.