Mailys, Sénégal

La couleur de l'amour

Pour les enfants du quartier, la porte rouge du Points-Coeur est un repère: ils savent que derrière cette porte il pourront recevoir l’amour et la paix dont ils ont tant besoin.

Un exemple de cette porte ouverte est Awa Petit, son nom a déjà été évoqué dans d’autres lettres. Awa a seize ans, une grande amie du Point-Cœur, très souriante et drôle. Elle est toujours là, le matin, devant la maison, prête à nous aider à balayer devant. Elle est atteinte d’un handicap physique et d’un retard mental. Un père absent et l’amour d’une mère un peu difficile. Awa passe beaucoup de temps à traîner dans la rue, où il lui arrive d’avoir des crises d’épilepsie aux quatre coins d’Arafat. Quand cela arrive, nous sommes souvent les premiers prévenus et nous accueillons Awa dans le Point-Cœur. Il m’a fallu plusieurs mois pour apprendre à l’aimer, il lui arrivait de mentir et de jouer de son handicap. Il est donc dur de savoir le vrai du faux dans toutes ses histoires. Mais, depuis le confinement, elle a grandi et se responsabilise. Plus de mensonges et elle passe beaucoup de temps au Point-Cœur pour faire son travail d’école avec un volontaire. Aussi, quand elle sent qu’une crise arrive, elle toque à la porte rouge pour être accueillie, installée sur une natte et rassurée durant sa crise.

Une autre petite tête bien connue au Point-Cœur est Alfonse !! Une boule d’énergie, un cerveau plein de bêtises, mais surtout un cœur à la recherche de beaucoup d’amour. Combien de fois, il aura mis une pierre pour que les volontaires ne ferment pas la porte rouge, ou il aura réussi à se faufiler et se cacher dans les quatre coins de la maison ! Un papa parti avec une autre femme et une maman qui travaille dur pour subvenir aux besoins de la famille. Alfonse cherche des repères et un cadre au sein du Point-Cœur. Un après-midi, où il avait fait mille bêtises pour entrer dans la maison, tapé, insulté, je l’ai puni. Le lendemain, il est venu me demander pardon, du haut de ses huit ans et un mètre vingt, pour ses bêtises faites la vielle et, le soir même, le voilà avec sa maman et ses frères et sœurs à la maison pour le dîner. Malgré sa fatigue et ma fatigue, nous avons fait ensemble l’immense vaisselle qui s’accumulait dans la cuisine après le repas : trente minutes de rire qui font s’envoler les heures de bêtises. Alfonse nous en fait voir de toutes les couleurs mais, surtout, la couleur de l’amour !