Gavroche
Lucile découvre son quartier de mission. Alors que le lieu n’a rien d’attirant, elle s’émerveille de la beauté rayonnante de Nelly, petite fille qu’elle vient de rencontrer.
J’attendais un ami qui devait nous apporter quelque chose pour une sœur de communauté malade. Je m’attendais à voir un adulte. Mais au contraire, c’est une petite gamine de dix ans qui est arrivée. J’étais d’autant plus surprise qu’elle était vraiment petite et toute frêle, on lui donnerait bien huit ans. Elle a voulu voir une petite terrasse qui a été faite récemment. Elle s’est émerveillée devant nos décorations de Noël, nos Rois Mages qui cheminaient devant l’entrée. Elle a fait le tour de la terrasse (de cinq mètres carrés peut-être) et s’est penchée sur le bord. J’ai eu peur, car nous sommes à deux-trois mètres au-dessus de la rue, sans barrières. Elle s’est penchée pour cueillir une fleur d’un arbre de notre jardin. Et, de fait, j’avais remarqué que les fleurs à cet endroit sont bien plus jolies que celles du même arbre accessible depuis le patio, sans risque et sans peine. Et elle se tenait là avec sa fleur (une très jolie fleur, d’une vive couleur fuchsia), qu’elle admirait. On aurait dit le Petit Prince et sa rose.
Puis elle repart, et alors que je la regarde s’en aller, je la vois danser, virevolter dans le jardin. C’était une scène charmante, pleine de légèreté et de douceur. Cela contrastait fortement avec le quartier sale, les dures exigences liées au covid (ici, même les enfants portent des masques) et la violence dont on n’est pas toujours témoins mais dont on sait qu’elle est présente. Ces enfants ne vivent pas dans un conte de fée et pourtant, celle-ci avait l’air d’en sortir. Elle s’appelle Jenny, on aurait dit Gavroche.